vendredi 6 juin 2014

L'Ecole






" Elle n'est pas allée à l'école "…je ne suis pas allée à l'école, enfin presque pas. Juste le temps de me rendre compte que je n'étais pas armée pour la lutte humaine qui commence au jardin d'enfants, et se termine, mais alors là pour tout le monde, dans la dernière boite où nous serons rangés, calmes et sages.


Je ne suis pas allée à l'école, c'est vrai – j'étais malade, dans mon corps et encore plus dans mon âme. Ce matin j'écoutais Catherine Millet parler de son dernier livre, " Une enfance de rêve " . Et pour d'autres raisons que les siennes, j'aurais pu parler de mon enfance comme elle, quand la pudeur veut que l'on remplace un mot trop douloureux par un autre, son contraire, son opposé.



Je ne suis pas allée à l'école et j'ai regardé, plus triste qu'il n'est souhaitable à un enfant de l'être, ceux qui passaient en bandes bruyantes, le cartable à la main, sur le dos. Moi je travaillais par correspondance, quand je le pouvais, quand ce n'était pas trop compliqué.



Je ne suis pas allée à l'école et ce fut une immense chance. J'ai rêvé autant que je le désirais, j'ai lu tout ce qui me tombait sous la main et de préférence ce que normalement je n'aurais pas dû lire. Calée dans un vieux fauteuil devant la bibliothèque, j'ai trouvé, certainement achetés au mètre et pour leurs superbes reliures rouges : tout Lamartine, tout Châteaubriand, tout Edmond Rostand – et oui, même lui – les œuvres complètes de Racine et de Corneille, le cher Victor Hugo.



Je ne suis pas allée à l'école, je n'y pas appris les codes et les us et coutumes, je n'y ai pas non plus découvert les modes d'emplois de la vie en communauté, les bienfaits ou les méfaits de la collectivité, la joie ou l'horreur de faire partie d'un troupeau quelconque. Je suis plutôt solitaire, les groupements humains me font assez peur, il m'arrive de faire des fautes d'orthographe et les maths me sont toujours " terra incognita ". 

Il faut me pardonner, je ne suis pas allée à l'école.

mardi 3 juin 2014

de l'usage de la solitude

Bodhgaya-Inde-photo fabian da costa 



" Et nous sommes comme des fruits. Nous pendons haut à des branches étrangement porteuses et nous endurons bien des vents. Ce qui est à nous, c'est notre maturité, notre douceur et notre beauté. Mais la force pour ça coule dans un seul tronc depuis une racine qui s'est propagée jusqu'à couvrir des mondes en nous tous.

Et si nous voulons témoigner en faveur de cette force, nous devons l'utiliser chacun dans le sens de sa plus grande solitude. Plus il y a de solitaires, plus solennelle, émouvante et puissante est leur communauté. "

          Rainer Maria Rilke " Notes sur la mélodie des choses. "

Rilke a 23 ans lorsqu'il écrit de texte court et magnifique. D'une grande beauté il annonce déjà toute la splendeur de la poésie à venir.

Eurydice...

                                   photo fabian da costa   Eurydice, Eurydice, je pense à toi ce soir. Il fait froid, il fait noir, et je t’...