lundi 1 septembre 2014

Nous partons...


Non pas là-bas


 





 

 Mais ici


Il faut bien changer un peu. Promis au retour des photos et des histoires. Bonne rentrée, à bientôt.



vendredi 6 juin 2014

L'Ecole






" Elle n'est pas allée à l'école "…je ne suis pas allée à l'école, enfin presque pas. Juste le temps de me rendre compte que je n'étais pas armée pour la lutte humaine qui commence au jardin d'enfants, et se termine, mais alors là pour tout le monde, dans la dernière boite où nous serons rangés, calmes et sages.


Je ne suis pas allée à l'école, c'est vrai – j'étais malade, dans mon corps et encore plus dans mon âme. Ce matin j'écoutais Catherine Millet parler de son dernier livre, " Une enfance de rêve " . Et pour d'autres raisons que les siennes, j'aurais pu parler de mon enfance comme elle, quand la pudeur veut que l'on remplace un mot trop douloureux par un autre, son contraire, son opposé.



Je ne suis pas allée à l'école et j'ai regardé, plus triste qu'il n'est souhaitable à un enfant de l'être, ceux qui passaient en bandes bruyantes, le cartable à la main, sur le dos. Moi je travaillais par correspondance, quand je le pouvais, quand ce n'était pas trop compliqué.



Je ne suis pas allée à l'école et ce fut une immense chance. J'ai rêvé autant que je le désirais, j'ai lu tout ce qui me tombait sous la main et de préférence ce que normalement je n'aurais pas dû lire. Calée dans un vieux fauteuil devant la bibliothèque, j'ai trouvé, certainement achetés au mètre et pour leurs superbes reliures rouges : tout Lamartine, tout Châteaubriand, tout Edmond Rostand – et oui, même lui – les œuvres complètes de Racine et de Corneille, le cher Victor Hugo.



Je ne suis pas allée à l'école, je n'y pas appris les codes et les us et coutumes, je n'y ai pas non plus découvert les modes d'emplois de la vie en communauté, les bienfaits ou les méfaits de la collectivité, la joie ou l'horreur de faire partie d'un troupeau quelconque. Je suis plutôt solitaire, les groupements humains me font assez peur, il m'arrive de faire des fautes d'orthographe et les maths me sont toujours " terra incognita ". 

Il faut me pardonner, je ne suis pas allée à l'école.

mardi 3 juin 2014

de l'usage de la solitude

Bodhgaya-Inde-photo fabian da costa 



" Et nous sommes comme des fruits. Nous pendons haut à des branches étrangement porteuses et nous endurons bien des vents. Ce qui est à nous, c'est notre maturité, notre douceur et notre beauté. Mais la force pour ça coule dans un seul tronc depuis une racine qui s'est propagée jusqu'à couvrir des mondes en nous tous.

Et si nous voulons témoigner en faveur de cette force, nous devons l'utiliser chacun dans le sens de sa plus grande solitude. Plus il y a de solitaires, plus solennelle, émouvante et puissante est leur communauté. "

          Rainer Maria Rilke " Notes sur la mélodie des choses. "

Rilke a 23 ans lorsqu'il écrit de texte court et magnifique. D'une grande beauté il annonce déjà toute la splendeur de la poésie à venir.

mercredi 28 mai 2014

Epices et parfums d'orient


                        Constantinople, l'an 1096, sur les quais de Péra     

 


     Pour l'heure, Marco le Génois et Ludo le Pisan, buvaient ensemble le vin grec que le cabaretier venait de renouveler dans leurs gobelets.
 –  Laisse là le pichet, dit Ludo, nous avons très soif. Que rapportes-tu dans ton vieux bateau pourri ? demanda-t'il  à Marco.
– Du blé.
 - Simplement du blé, rien d'autre vraiment ? Toute une galiote de vingt gaillards pour du blé ?  Marco se resservit largement avant de répondre.
-  Des esclaves aussi. Comme nous n'avions plus de place dans la cale, nous les avons mis aux bancs de rame jusqu'ici. Après leur vente, nous embaucherons de nouveaux rameurs pour repartir.
            Ludo essaya de sourire, ce qui équivalait pour lui à découvrir des dents largement pourries. Son visage était barré d'une horrible et profonde entaille qui commençait sur la lèvre inférieure pour se terminer loin dans le cuir chevelu.
Les routes maritimes étaient aussi encombrées que peu sûres, dans ces parages. La différence entre marins et pirates, marchands et pillards, était bien faible. Il n'avait jamais su quelle main tenait la hache qui lui avait fendu la figure, le jour où son bateau avait été attaqué au large des côtes d'Amalfi.
        Heureusement pour lui, Ludo avait de l'or dans sa ceinture, de l'or qui permettait de payer le médecin arabe qui l'avait recousu et sauvé. Rares étaient les chirurgiens qui employaient un analgésique durant leurs interventions - quelques juifs parfois - mais les Grecs s'y risquaient peu, craignant de voir leurs patients endormis pour toujours. Ils tentaient plus souvent d'atténuer leurs souffrances, en utilisant le pouvoir du lotus bleu qui ouvrait le matin pour les refermer le soir, des fleurs céruléennes et sédatives.
Ludo avait été emporté d'une main experte par quelques larmes rougeâtres, extraites des graines de pavot. Ce suc affreusement amer lui avait été administré mélangé à du miel. Une bienheureuse torpeur l'avait envahi ; un bourdonnement d'abeilles géantes, une chute molle et douce dans un profond abîme dont il était revenu défiguré à jamais certes, mais suffisamment réparé pour reprendre une vie normale. Une vie moins risquée que celle d'avant, une vie de marchand assez riche pour avoir sur les quais de Péra son entrepôt approvisionné par des bateaux qui lui appartenaient, mais sur lesquels il ne naviguait plus. 
D'autres marins plus jeunes et surtout moins nantis, rapportaient pour lui dans les cales de leurs navires, la cannelle, le gingembre, le poivre et le safran. Epices recherchées et fines venues des Indes, qui voisinaient dans ses réserves avec le santal, la myrrhe, le benjoin. Toutes ces essences rares arrivaient ici dans des sacs poisseux de larmes lourdes et grasses qui suintaient à travers les grosses toiles de jute, ou bien  enfermées dans des vases de terre cuite. Lorsque Ludo ôtait la cire et le liège qui en gardaient le contenu, les parfums longtemps retenus s'élevaient dans l'air, si violents, qu'on aurait pu les croire vivants et marchant dans les allées, venant à la rencontre de ceux qui se penchaient au-dessus de leurs puissantes effluves. 

 Anne da Costa " Anne Comnène Princesse de Byzance " ( en écriture )

samedi 24 mai 2014

Du bon usage du ménage



photo fabian da costa


   Non, je ne suis pas du genre maniaco-compulsive : " Je vais faire mon carrelage et mes vitres, juste avant de mettre en route, ma tête de veau et mes pieds paquets.

   Mais je dois reconnaître que peu de choses me semblent aussi rapidement satisfaisantes que le ménage. C'est sale, on lave, c'est propre - il y a de la poussière, on essuie, ça brille - les poubelles débordent,  on les vide, c'est terminé.

   La récompense est là tout de suite, accompagnée d'un délicieux sentiment de devoir accompli. Parce que sinon, autrement, d'autres fois, dans d'autres domaines : on fait un mail et on ne voit pas venir la réponse, on laisse un message sur répondeur et personne ne rappelle, on ouvre l'écran blanc de l'ordinateur et l'inspiration n'est pas là, on attend un contrat et la boite aux lettres reste désespérément vide, ( sauf la pub et les factures )

   Donc peu de choses donnent autant de plaisir immédiat que de faire le ménage : sauf peut-être une plaque de chocolat noir aux oranges confites...

   Mais bon, il faut considérer objectivement que ce n'est jamais fait une fois pour toutes et que ce plaisir revient avec une régularité qui peut devenir lassante. Vous me direz qu'il en est ainsi de toutes les choses de la vie : ce n'est pas faux.

   Malgré tout j'espère que ces quelques lignes ne tomberont pas sous les yeux de la gent masculine qui vit sous mon toit, et j'inclus mon chat...
   
   Femmes, mes soeurs, vous me comprenez à demi-mot, il n'est pas utile de leur donner des bâtons pour me faire battre.




Eurydice...

                                   photo fabian da costa   Eurydice, Eurydice, je pense à toi ce soir. Il fait froid, il fait noir, et je t’...