lundi 15 octobre 2012

Shakti



Bénarès - photo fabian da costa



 Cette puissance féminine créatrice de tout ce qui existe dans l'univers, cette force divine qui s'unit au masculin pour donner la vie, ainsi que le décrit un ancien texte du Cashmire :

" Chaque fois que Shiva et Shakti resserrent leur étreinte
 d'un espace égal à l'épaisseur d'un cheveu,
quelque part dans l'univers une galaxie disparaît.
Chaque fois qu'ils desserrent leur étreinte d'un cheveu,
Une nouvelle galaxie est née. "

            Malgré tout ce que nous pouvons savoir de la condition de la femme en Inde, et après tout sommes-nous bien certain d'être chez-nous des modèles en la matière, je persiste à croire et à voir, que la femme indienne possède cette shakti, tout autant que je trouve qu'elle fait cruellement défaut aux femmes occidentales. Cela bien entendu n'engage que moi, et je reconnais volontiers que je ne parle ici que de généralités.

            Sans doute est-ce grâce à cette force que les femmes indiennes ont résisté à tant de mauvais traitement dans les pires des cas, ou simplement aux coutumes contraignantes de la vie courante. L'Inde est quand même le pays qui s'est donné une femme premier ministre, où elles sont majoritairement à la tête des conseils municipaux, où les femmes médecins, avocates, chefs d'entreprises, ne se comptent pas.

            Mais ce qui me touche le plus, c'est la shakti ordinaire si j'ose dire, la flamme qui brûle discrète mais bien présente, dans ces femmes de tous les jours. Celle qui leur donne la fierté, la générosité, la noblesse qui transparaît dans les plus humbles paysannes. La shakti qui m'a fait je l'avoue rire de plaisir, je l'ai vu à l'œuvre à Madurai, dans l'immense temple de Meenakshi.

            Meenakshi est l'épouse de Shiva, sous l'un de ses nombreux noms. Son indispensable parèdre. Tous les soirs, en grand cortège et grande pompe, Shiva est conduit en palanquin rejoindre Meenakshi dans l'autel qui lui est consacré. Les rideaux sont tirés et les prêtres laissent pour la nuit, les divins époux s'aimer. Le lendemain matin, Shiva est reconduit dans sa demeure, et ainsi tous les jours.

Mais une fois par semaine, la déesse est déposée sur un char, uniquement tiré par les femmes. Meenakshi disparaît sous des dizaines de saris précieux et quantité de guirlandes de fleurs. Un taureau blanc et la fanfare du temple précèdent la procession qui fait le tour de l'enceinte du temple. Le char est très lourd et les femmes nombreuses à le faire rouler lentement dans la nuit. Les femmes, mais pas les hommes – sauf un malheureux inconscient, qui voulut s'immiscer dans la cohorte féminine accrochée aux montants du char. 

Grave erreur, car j'ai vu la Shakti courroucée lui en faire payer le prix. Une dame, ni très jeune, ni très grande, se tourna vers l'intrus et d'une main, car de l'autre elle s'agrippait à sa place, elle frappa violemment le pauvre homme avec son joli sac à main. Sous les coups redoublés, il dut se retirer piteusement et j'ai senti courir sous les saris, des ondes de profonde satisfaction.

           

3 commentaires:

  1. Woaw ! Quelle magnifique découverte que ce blog! Je suis très heureuse d'être passée par ici. Les textes sont édifiants et les photos tout simplement magnifiques. Ça fait du bien à l'âme. Un immense merci!

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  2. Un caractère féminin que je ne connaissais pas et que je découvre avec ta pointe d'humour quant au frisson de satisfaction ...

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  3. D'accord avec toi. Lorsque je suis revenu de mon premier voyage en Inde, qui a duré 6 mois, j'ai été choqué par la vulgarité de notre monde occidental et de la tenue des femmes.
    Ce n'est pas seulement l'habit mais une manière d'être. Là bas j'étais touché par cette shakti dont tu parles, au delà de la "condition féminine". Très belle photo.

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