photo©fabian da costa
" le pachyderme Monde, qui hibernait, secoue sa torpeur et se redresse, met debout son immensité ... "
Steve Jourdain, Cette vie m’aime
Jamais nulle part ailleurs qu'en Inde, je n'ai connu ces moments d'intense présence, de plénitude si totale qu'il n'y avait rien à en retrancher ou à en ajouter. Rien, absolument rien - tout était parfait dans un présent absolu. Et chose plus stupéfiante encore, j'étais moi-même parfaite dans cette perfection, accordée dans l'harmonie la plus exacte, unie par toutes mes cellules à l'Univers.
Et ces instants bénis, ne sont pas venus uniquement dans des lieux ou des moments exceptionnels. Je les ai vécus au milieu des pires embouteillages, dans des banlieues sans grâce, sur des routes défoncées, parmi les hurlements des klaxons indiens plus virulents que n'importe quelle bactérie. Ils m'ont saisi aussi il est vrai, devant un regard profond et pénétrant, à l'entrée d'un temple où les colonnes semblaient vibrer d'une vie propre, dans le frémissement particulier qui accompagne la descente du jour, à travers la musique légère des bracelets de chevilles des jeunes filles qui venaient le matin à la fontaine, sous mes fenêtres.
Je sais que je suis loin d'être la seule à vivre cette expérience en Inde – mais ce qui m'interroge, ce qui me laisse un peu triste et perplexe, c'est de ne pas pouvoir trouver cette intensité de vie, ici, chez-moi. Et je n'en accuse personne d'autre que moi-même, aussi lourde que " ce vieux pachyderme Monde ", ce pachyderme qui en moi sommeille, et ne parvient pas à sortir de sa torpeur.
Et si je devais émettre un souhait, un vœux, ce serait d'être capable de cette ouverture, de cet éveil au monde quotidien qui est le mien, là où je vis, là où je suis. Que chaque chose connue me soit nouvelle, que chaque rencontre habituelle devienne exceptionnelle. Je sais que cela ne dépend que de moi, que de la qualité de mon regard, que du désir de mon cœur….Quel travail…A moins qu'il n'y ait rien d'autre à faire que d'être tout simplement…le plus difficile évidemment.
Je vois bien ce que tu veux dire.
RépondreSupprimerQuand on voyage on se déporte de soi, je crois, et on ose aussi beaucoup plus se laisser jouir de ce qu'on ressent.
Ici ?
Etre émerveillée et surtout le dire, ne pas rester en silence dans la foule d'émotions de la vie. Partager l'aimer. C'est le silence des êtres ici qui me rend toujours interrogative. sortir de toute peur et oser se poser sur les épaules.